Un beau projet né d’une belle rencontre. Lors d’un stage d’apiculture et de biodiversité donné par Maurice Rouvière, président de l’association Abeille et sagesse, une participante lui parle de son héritage d’un rucher tronc abandonné en Lozère. Isée Douay est déjà investi à la ferme pilote de St André qui produit selon les règles respectueuses de la nature. Elle est justement là pour apprendre à s’occuper des abeilles afin de réhabiliter ce lieu. Et quel lieu !
Les ruches troncs, patrimoine historique et biologique
Une visite sur place dans le secteur de la Vallée française, organisé peu après, s’avère plus que surprenante. Soixante-deux ruches troncs plus que centenaires en parfait état. Ce sont des morceaux des troncs de châtaigniers entre 60 et 80 cm de haut, car nous sommes dans les Cévennes, le pays de la châtaigne.
La technique est ancestrale, elle consiste à creuser une cavité d’environ 25 cm de diamètre qui servira de corps de ruche. Le bois de châtaignier est très résistant et peut se conserver plusieurs siècles. Une pierre plate en schiste, la lauze, protège le tronc des intempéries. Les ruches troncs permettent la double récolte de la cire et du miel sans pour autant endommager le couvain qui se trouve en dessous. Ce fait mentionné en 1600 par l’Ardéchois Olivier de Serres nous montre que la destruction systématique des colonies lors de la récolte n’était plus à l’ordre du jour depuis bien longtemps.
L’abeille locale des Cévennes, une ressource génétique
Maurice Rouvière, lorsqu’il s’est rendu sur place, a été frappé par la beauté du lieu et le parfait état de ces ruches troncs ridées par les saisons qui se succèdent : « C’est un véritable musée à ciel ouvert et une formidable découverte pour l’apiculture. »
Après un petit nettoyage et des arrachages d’herbes, cinq essaims d’abeilles locales sont installés sur le lieu. Il est très important de peupler ces ruches avec des souches d’abeilles de la lignée ouest-européenne qui ont une rusticité adaptée au climat rigoureux de ce milieu naturel. En le laissant se développer sans intervention majeur par l’homme, nous avons constaté sous des conditions similaires que les souches d’abeilles retrouvent une génétique s’approchant leurs origines locales. Ce lieu deviendra une véritable richesse par sa structure d’une valeur patrimoniale et par le contenu, la réserve du génotype locale d’abeilles des Cévennes.
Réhabilitation du rucher – d’abord pour la biodiversité
Une convention a été signée entre l’association Abeille et sagesse et la propriétaire du lieu pour sa restauration et la conduite du rucher. L’association va le remettre en état et le repeupler peu à peu. Réinstaller les abeilles sans penser à produire pour le profit est la philosophie défendue par Maurice Rouvière : « Autrefois, on prélevait le miel uniquement pour la consommation de la maison. Aujourd’hui, certains prélèvent du miel de manière intensive sans penser que ces insectes se nourrissent aussi du produit de leur ruche, pour survivre en hiver et dans les périodes où les plantes mellifères sont plus rares ou pas encore en floraison. Il ne faut pas oublier que la biodiversité va de pair avec la survie des abeilles. » (midi-libre du 29 mai 2Ol9)
Abeilles en liberté, magazine engagé pour la biodiversité ordinaire, propose son soutien et devient partenaire de ce sauvetage début 2019. Ce rucher va être une opération en grandeur nature en faveur d’abeilles libres, capables de vivre leur vie, en espérant qu’elles retrouvent leur nature sauvage, leur rusticité.
Elles n’ont pas vraiment besoin de nos soins ! Faisons leurs confiance et grâce à la réhabilitation de ce rucher et de bien d’autres, retrouvons aussi la confiance en nous et l’énergie nécessaire pour recréer la biodiversité, garante de notre (sur)vie.
voir aussi. ‘recolte a chalbos’ sur youtube , 200 troncs en etat dont 40 repeuples en abeilles noires
Bonjour
Allez visiter à Aujac, dans les Cévennes, exactement les mêmes ruches de Mr Peyric, ainsi que sa clède ( séchoir à châtaignes), la visite est vraiment passionnante ( nous l’avons faite cet été au cours de nos vacances) !
C’est une bonne idée, merci pour l’information.
Bonjour,
Comment expliquer qu’aucune de ces ruches tronc n’était colonisée ?
Le texte mentionne que, « Après un petit nettoyage et des arrachages d’herbes, cinq essaims d’abeilles locales sont installés sur le lieu ».
Les ruchers troncs ont été victimes de 2 « malédictions ». la première est la désertification des campagnes Cévenoles qui se sont vidées partiellement de leur populations paysannes au profit des industries citadines. De fait plus d’entretien, plus d’accompagnement des abeilles. La deuxième « « malédiction » a été l’arrivée de Varroa il y a une quarantaine d’années et aussi le changement progressif des populations d’abeilles au profit d’abeilles absolument inadaptées au climat Cévenole (intérêt de l’abeille noire endémique…). Les transhumances, les sélections ont rendu fragiles les populations d’abeilles par le fait des métissages et la perte des qualités d’adaptation spécifiques aux collines Cévenoles. Depuis, les populations « sauvages » d’abeilles noires s’étant considérablement raréfiées, les ruchers troncs abandonnés ont perdu leur population sans espoir de renouvellement. D’un autre côté, il n’est pas fréquent que des essaims naturels recolonisent les ruches troncs. Celles-ci, pour la plus part très anciennes ne sont guère « appétissantes ». Souvent fendues, garnies de nids de frelons ou guêpes, araignées (il est faux de dire que le châtaignier éloignent les araignées…) la plus part ont quelques siècles d’existence… De plus la tradition voulait que les ruchers troncs soient exposés plein soleil. Voir même, ils étaient construit comme des « solarium »… N’oublions pas que l’abeille est un insecte forestier qui privilégies l’orée et lisière des bois, les abords de clairière afin de profiter des ombres apaisantes et lumières chauffantes. Maintenues à demeure en plein soleil par l’apiculture il n’est pas évident qu’elles choisissent naturellement ces emplacements difficiles à vivre.
Henri Giorgi
Magnifique j’adore ,peut on le visiter
Bonjour, en priori non mais interrogez toujours un des responsables Maurice Rouvière : maurice.rouviere30@gmail.com
Et il est où ce rucher ? J’en retape un qui servait à la production de cire pour les abbayes.
Il se trouve à St André en Vallée Française.
Magnifique, quelle chance !
Je vous souhaite franc succès, c’est un défi vraiment génial.
J’adorerais en être !
Magnifique ! L’amitié entre les hommes et les abeilles…