Manifeste pour une apiculture punk

Une vision utilitariste

Depuis quelque temps, les ruches alternatives s’invitent dans les jardins et les techniques a priori réservées à l’apiculture naturelle — comme par exemple proposer aux abeilles des cires en construction libre — se démocratisent, voire sont intégrées chez certains producteurs de miel.

Mais bien souvent, ces évolutions sont regardées d’un mauvais œil par les apiculteurs, car elles sont considérées comme « arriérées », « inefficaces », et même « dangereuses ». Certains allant jusqu’à souhaiter qu’un « permis » soit exigé pour avoir le droit d’installer une ruche dans son jardin. Cette idéologie du contrôle n’est pas nouvelle, mais à y regarder plus attentivement, elle est bien plus présente qu’on ne le pense.

La ruche est considérée uniquement comme productrice : de miel, de reines, d’essaims, que l’on pourra consommer ou vendre, et rarement comme l’abri d’un animal. Le vocabulaire professionnel est repris volontiers par les amateurs, qui ne veulent pas risquer de paraître moins performants que leurs modèles vivant du métier. Les ruches moins productives sont des « non-valeurs », les reines plus vieilles sont des « carnes », un essaim récolté dans la nature « ne vaut rien »… On ne tue pas les reines, on « renouvelle le cheptel », on a même un « taux de renouvellement » à respecter, pour faire perdurer « l’exploitation ».

Le mot « exploitation » en dit long. À l’instar du grand patron — symbole capitaliste — qui exploite ses ouvriers, l’apiculteur exploite ses abeilles. Elles doivent être productives, rentables, ou elles seront licenciées. Et par licenciées, entendez tuées, ou « renouvelées », si vous préférez. Si vous faites la remarque à un apiculteur professionnel, il vous rétorquera qu’il n’a pas le choix, puisqu’il faut bien faire vivre sa famille, et que c’est son métier. De ce point de vue, il aura mille fois raison. L’origine de la surexploitation des abeilles en occident est purement économique. Cela n’a rien à voir avec le bien-être animal, le respect de la nature, la passion ou encore simplement la joie trouvée en s’occupant des ruches, c’est l’économie qui dicte la manière de mener les abeilles. Alors, si ce constat ne nous convient pas, que proposer à la place ?

Passer outre l’objectif économique

Il y a quelque temps, le pépiniériste Éric Lenoir écrivait son Petit traité du jardin punk, dans lequel il expliquait avec passion et talent comment remettre en cause les dogmes du jardinage. De la même manière chez les apiculteurs, dans la foule de manuels existants, quelques auteurs se risquent à proposer autre chose, comme Olivier Duprez et la ruche Warré, ou Pierre Javaudin et la ruche Kenyane, et quelques autres encore proposant des ruches de biodiversité ou d’accueil des essaims vagabonds. Mais au-delà du modèle de ruche, ils exposent surtout une autre manière d’être avec les abeilles. La productivité est mise de côté, pour préférer l’observation, la compréhension, l’acceptation d’un temps long afin d’appréhender un peu mieux la colonie présente. Le miel ou les essaims, alors, seront un bonus, qui n’est pas obligatoire. On sort de l’objectif économique, on s’en libère, et c’est désormais le bien-être des abeilles qui devient la priorité. Et il y a dans cette attitude quelque chose de l’ordre du rejet. Rejet d’un ordre établi, qui broie les abeilles, certes, mais qui broie également les paysages, les animaux en général, et parmi eux l’humain lui-même, à la fois victime et acteur de sa déchéance.

Malgré l’image du « rebelle » parfois mal perçu que cela engendre, il y a tout de même quelque chose de très sain dans ce rejet, que nous pourrions célébrer. En cela, le mouvement punk nous donne un exemple concret de ce que peut être une danse sur le cadavre du capitalisme. Il donne une réponse radicalement simple à toutes les questions que l’on posera à l’apiculteur qui ne fait pas comme les autres : « Je m’en fous ! ». Tes abeilles vont mourir si tu ne fais pas cela : « Je m’en fous ! ». Ton essaim ne vaut rien : « Je m’en fous ! ». Tu ne seras jamais un véritable apiculteur : « Je m’en fous ! ».

On pourra enchaîner avec un argument de poids : « Je m’en fous, car il n’y a de toutes façons aucun futur dans une société capitaliste, ni pour les abeilles, ni même pour les humains !». Car avec cinquante ans de recul, ces jeunes rebelles qui n’avaient aucune envie d’être pris au sérieux, étaient dans le vrai : il n’y avait bel et bien aucun futur dans cette organisation sociale. Les problématiques climatiques, l’instabilité géopolitique entraînée par les sociétés capitalistes, sont aujourd’hui des évidences pour les générations actuelles. Il est grand temps de proposer une apiculture punk et d’en finir avec l’apiculture capitaliste.

Comment devenir un apiculteur punk ?

Bien entendu les punks n’ont aucune règle, alors vous ferez comme vous voulez. Mais on peut tout de même donner quelques pistes, que chacun pourra suivre ou ne pas suivre. La philosophie punk respecte en revanche des valeurs essentielles : liberté, refus des rapports de domination et d’exploitation, rejet de la consommation de masse, respect de l’autre comme mon égal.

Prendre son temps, accepter de perdre le contrôle. La colonie d’abeille fait ce qu’elle veut, n’enragez pas de « perdre » un essaim, il n’était pas à vous, et d’ailleurs « la propriété c’est le vol », comme le disait un vieillard misogyne.

Observer. Oui, c’est une perte de temps. Et le temps c’est de l’argent ? Non, le temps, c’est du temps, et c’est le vôtre, libre à vous de vous le réapproprier et de le passer à regarder vos abeilles si ça vous chante.  En outre, observer, c’est la base de toute connaissance… Et cela sera d’une valeur inestimable pour juger de la santé de la colonie. Moins intervenir passe par là : apprendre à observer et détecter les potentiels soucis des abeilles accueillies, et les aider si besoin.

Un seul mot d’ordre : désordre ! Non, la ruche n’est pas un HLM au carré ! Les abeilles aiment le « bordel », ou plutôt ce que nous prenons comme tel et qui pourrait bien être très ordonné. Laissons-les faire ! Laissez-les construire leurs cires comme elles le veulent !

Recycler, récupérer. Le punk n’a aucune envie de faire marcher le capitalisme en lui achetant des ruches.  Sans sacrifier les besoins naturels des abeilles, vous pouvez en bricoler une avec des matériaux de récupération, ce n’est pas ça qui manque.

La philosophie « No Futur ». L’apiculture moderne, ennuyeuse et consommatrice de ressources, n’a pas d’avenir. Et s’il n’y a pas d’avenir, amusez-vous, ce sera déjà ça de pris !

Transgressez les règles. On doit changer les reines, on doit stimuler au sirop, on doit traiter contre varroa… En fait, non. Faites comme vous voulez, quelques surprises vous attendent.

Regroupez-vous ! La solidarité est votre force. Vous serez bien meilleurs à plusieurs. La débrouille, en apiculture comme ailleurs, se pense en groupe. Un rucher collectif est une bonne option. Le miel produit sera partagé, une bonne occasion d’être solidaires, et de remplacer le sucre de betteraves du supermarché !

La qualité, pas la quantité ! L’apiculture est une bonne activité de subsistance, et votre condition de punk sans le sou ne doit pas vous contraindre à manger n’importe quoi. Produire son miel, voilà un projet d’auto consommation qui vous apportera du bonheur. En revanche, on fera attention de ne pas saturer le territoire avec nos ruches, sans quoi nos abeilles pourraient faire concurrence à leurs cousines sauvages.

S’auto-éduquer. À l’école de l’apiculture, on apprend à faire du miel. Le punk s’éduquera autrement : comprendre les besoins des abeilles, et inventer une apiculture respectueuse de la colonie sera sans doute plus à son goût ! On pourra particulièrement s’intéresser aux besoins des abeilles et à des solutions d’amélioration de leur environnement direct, afin de leur assurer un bon accueil.

Alors, on fait n’importe quoi ?

Refuser un dogme, un maître, ce n’est pas refuser l’ordre. Élisée Reclus, géographe talentueux et anarchiste, affirmait que « L’anarchie est la plus haute expression de l’ordre ». Chacun étant maître de lui-même, il devient responsable dans le même temps de ses actes. Dès lors, la conscience de devoir s’occuper correctement de la colonie suffit à l’apiculteur. Seulement, il devra décider de ce qu’il peut faire et s’assurer que c’est bon pour les abeilles, en son âme et conscience. Et pourquoi ne pas accepter l’idée que naturellement, en parfaite autogestion, elles prendront elles- mêmes les bonnes décisions ? Le rôle de l’apiculteur peut dès lors être d’accepter d’en faire moins.

Concrètement, cela doit simplement ouvrir les possibles. Ne pas traiter systématiquement contre le varroa, mais simplement prendre conscience de la capacité naturelle de certaines colonies à s’y adapter. Ne pas nourrir pour tirer profit de la colonie mais observer et surveiller afin de simplement lui éviter la famine. Favoriser une génétique adaptée au biotope local, plutôt que d’aller chercher la performance avec des hybrides hors sol. Laisser essaimer les abeilles si on estime que c’est dans l’ordre des choses et tant pis pour le miel qu’on ne récoltera pas.

Voici quelques principes pour tracer les contours d’une apiculture punk. Amusez-vous, faites même si vous ne savez pas faire, soyez autodidactes, lancez-vous à corps perdu dans l’aventure, et ce sera un bon début. Un début pour rien peut-être, ou un début de changement de vision de l’abeille, et de la société humaine ?

Certains diront qu’il est trop tard ? On s’en fout !

L’écriture d’un Manifeste pour une apiculture punk est en cours… Inspiré des expériences personnelles de l’auteur, des magnifiques livres d’Éric Lenoir (Petit traité du jardin punk & Grand traité du jardin punk, chez Terre vivante) et de l’univers particulier de Sam Comfort (Anarchy Apiaries), apiculteur inspirant de Caroline du Nord.

Merci à Stéphane Bonnet et Éric Lenoir pour leurs relectures et apports à cet article.

42 Comments

  1. Bonjour,
    Merci pour cet article pogo au milieu des ruches à miel 🙂

    Je remarque que, comme souvent, la plupart des réactions de rejet viennent de peurs. Plus ou moins fondées, plus ou moins imprégnées par une vision productiviste de l’apiculture. Plus ou moins normées.
    Et finalement aller vers une autre forme d’apiculture c’est aller vers ses peurs. Un chemin vers la liberté non? 🙂

    Le point sensible semble être le varroa.
    C’est sur que quand tu vois une colonie décimée la peur a un fondement. Mais peut on faire l’effort de la tenir éloignée le temps d’un instant de réflexion?
    Quand je dis que je ne traite pas à priori la plupart du temps j’ai comme retour: tu fais se proliférer le problème! Moi je traite et tes abeilles remettent le varroa partout!
    On respire et on laisse venir l’oxygène au cerveau…
    Si traiter était la solution pour qu’il n’y ait plus de varroa ça se saurait non? Je veux dire que c’est prouvé maintenant que les traitements chimiques le renforce et cela me semble illusoire de penser pouvoir l’éradiquer de la planète. De plus cela voudrait dire qu’il faut aussi aller traiter les essaims sauvages parce que quel danger pour les abeilles sinon!!!
    Donc ce que je contrôle en traitant c’est ma ruche pas la population mondiale de varroa. Je n’agresse pas vos abeilles en ne traitant pas. Pas plus qu’un essaim sauvage.

    Donc reste le problème personnel de son rapport à la ruche. Et cela revient là aussi à aller visiter ses peurs. Le contrôle… On peut facilement y voir un miroir de ce qu’on fait dans nos rapport avec le monde en général d’ailleurs.
    Et, si on lâche un peu de ce contrôle cela fait s’ouvrir à une autre vision, une autre compréhension de l’abeille.
    Elles ont une capacité d’adaptation impressionnante.
    En observant la planche d’envol ou le trou de vol il est assez facile de repérer des comportements qui signalent qu’elles ont des capacités pour gérer le varroa. Il y a des contrôleuses/épouilleuses, elles sortent des larves blanches, elles sortent des abeilles vivantes. Il y a leur vitalité, l’ambiance générale, les rentrées de pollen… On peut aussi voir si une infestation se produit car souvent le symptôme des ailes atrophiées est là.
    Dans ce cas je trouve mes limites de certitude. Il n’est pas facile de voir une colonie mourir.
    Pour traiter, au cours d’un projet collectif, nous avons pu tester l’enfumage à l’origan. C’est utilisé en amérique du sud et ça les fait bien tomber. Alors en dernier recours, si c’est un essaim que j’ai amené… Le cas ne s’est pas présenté.
    Pour moi le corps de la ruche a quelque chose d’un peu « sacré ». Si on n’y met pas de cadre on peut voir leur intelligence se manifester dans la gestion de la forme des cires, c’est là où la mère pond, où les jeunes sont élevées, où se passent leur transformation si particulière. C’est l’endroit où de milliers d’êtres elles n’en font plus qu’un. Dans mon ressenti, c’est à elles et je n’y viens pas.
    Alors si je veux les aider cela se passe dehors. Par l’observation pour le varroa, la famine mais aussi par ce que je peux mettre à disposition parmi les choses qui comptent pour elles. Pollen, nectar à travers des plantations sans pesticide, de l’eau le plus possible de qualité avec de l’argile verte, du thym, un habitat faible consommation d’énergie. Leur laisser leur miel( peu ou pas de récolte) et venir les voir en laissant mes peurs à l’entrée. Et c’est ça le plus dur 🙂
    Avec les ruches à cadres il existe des protocoles de sélection de mères porteuses des comportements sanitaires jouant dans leur adaptation aux varroas. Il y a d’autres chemins que le traitement même dans un cadre plus professionnel.

    Et quand je les regarde faire, avec le varroa, avec le frelon asiatique, avec les floraisons décalées, la sécheresse, que je vois varier leur population comme si elles savaient le timing des fleurs, du temps, je me dis que oui, purée, elles ont de sacrées capacités d’adaptation…
    Et finalement le seul truc qu’elles gèrent pas ou peu quand on les laisse un peu plus libres et que leur génétique est ok, ce sont les pesticides.
    Alors ok varroa, mais attention au chiffon rouge qui ne fait pas regarder toutes les autres causes qui les empêchent de s’adapter. Dans les années 70/80 le varroa était là, les abeilles ne tombaient pas comme ça.

    Quand on sort le nez de la production de miel et du contrôle permanent, donc de la peur permanente, on découvre ou redécouvre l’abeille et tout ce qu’elle apporte à un lieu, à l’humain. Alors quand tout est en place pour, le miel devient un partage et vu la saveur, il n’y a pas besoin de beaucoup pour le plaisir ou des soins.

    Merci Mathieu pour la mise en avant de ces idées, et d’être, comme un punk, montré du doigt pour une forme qui fait peur pour qu’elles soient vues et qu’elles vivent 😉

  2. Et oui, l’apiculture c’est l’élevage des abeilles pour récolter du miel. Étonnant qu’un ancien pro ne se souvienne pas de cette définition. Quand on se dit proche de la nature, on n’encourage pas plus les « punks » à avoir des ruches dont on ne s’occupe pas. C’est inutile et c’est contre productif pour la biodiversité que vous semblez vouloir défendre. Les entomologistes vous le répètent régulièrement : les abeilles domestiques entrent en concurrence avec les autres pollinisateurs. Pensez à créer un annuaire des apiculteurs « punks » qu’on puisse les appeler pour qu’ils sauvent leurs essaims qui se sont installés derrière les volets, dans les cheminées ou sous les toitures…

    • Bonjour Philippe, je retiens l’idée d’un annuaire, qui peut être en effet très pratique.
      En revanche je n’encourage personne. Je propose à un public (restreint) une forme d’apiculture qui peut leur correspondre.
      Je propose simplement à des apiculteurs amateurs de se poser des questions sur leur pratique.
      Je pose les question mais je n’anticipe pas les réponses, il me sera donc bien difficile de vous confirmer ou non le fait qu’ils souhaiteront laisser essaimer les colonies, ou qu’ils souhaiteront compter les varroas et faire des traitements par exemple…
      Quant à la quantité d’abeilles mellifères dans notre environnement, vous confirmez ce qui est décrit dans le paragraphe « la qualité, pas la quantité » de l’article, merci à vous.

    • Cher Philippe Durand,
      C’est un bien cruel destin que celui de notre revue : trop naturaliste aux yeux des apiculteurs et trop apicole à ceux des entomologistes ! Houspillés par les uns et rudoyés par les autres, nous sommes décidément mal compris, ou peut-être mal lus, car nous ne visons pourtant qu’une vaste réconciliation de tout ce petit monde… À l’occasion, attardez-vous sur quelque-uns des articles de cette plateforme ou feuilletez nos publications papiers : vous constaterez que nous n’envisageons guère de pratique apicole soutenable sans prise en compte de l’ensemble des interrelations vivantes dans lesquelles les abeilles mellifères sont insérées.

      Laissez-moi vous rassurer : l’apiculteur « punk » n’a pas pour vocation de surcharger davantage les milieux avec des hordes d’abeilles mellifères biberonnées et d’aggraver la situation dramatique des autres pollinisateurs. Nombre de nos articles alertent l’apiculture sur ce sujet complexe, ainsi sur la transmission, par le biais de cheptels apicoles, de certaines pathologies et virus aux bourdons par exemple. Lisez aussi la récente série d’articles d’Isabelle Avisse consacrée aux pressions exercées par l’agriculture conventionnelle sur les abeilles sauvages, vous constaterez que notre vision est plus large.

      Contrairement à ce que vous dîtes, l’apiculture n’est pas tenue de se réduire à l’exploitation des abeilles mellifères, elle peut aussi être non productive, proposer de simples abris et viser un peuplement naturel et soutenable pour les milieux. Documenter cette approche et élargir le champ des pratiques apicoles font partie des raisons d’être de cette plateforme. https://www.abeillesenliberte.fr/accueillir-et-proteger-ruches-de-biodiversite-chez-custos-apium/

      Les entomologistes ont beau le répéter, ça n’en devient pas une vérité : les abeilles mellifères ne sont pas domestiques, du moins pas encore ! Une véritable domestication de l’abeille mellifère impliquerait le contrôle total de l’alimentation et de la reproduction des colonies. C’est à la rigueur un projet, mais sur le terrain ce n’est pas ce qui se passe, la reproduction étant bien souvent naturelle. Les abeilles mellifères sont surtout sauvages : elles sont en capacité de se nourrir, de se reproduire et — sous certaines conditions — de se soigner sans intervention humaine.
      https://www.abeillesenliberte.fr/pourquoi-les-abeilles-meurent-une-cause-oubliee/

      Nous devons souvent rappeler qu’Apis mellifera mellifera, l’abeille noire, est présente en Europe de l’Ouest depuis plus d’un million d’années et qu’elle a co-évolué avec la flore, les pathogènes, les prédateurs et les autres pollinisateurs. À ce titre, elle fait donc partie de la biodiversité, même si certaines pratiques de l’apiculture intensive s’emploient à l’en extraire. https://www.abeillesenliberte.fr/labeille-victime-de-lintensification-de-lapiculture/

      Finalement, plutôt que de véhiculer des idées reçues, peut-être vaut-il mieux encourager des pratiques diversifiées de l’apiculture et laisser une place à celles qui sont détachées des impératifs de rentabilité. Cela pourrait permettre de protéger la diversité génétique de l’abeille, contribuer à désencombrer les milieux des abeilles exogènes, éviter la transmission des maladies entre espèces en privilégiant des pratiques soutenables favorisant la bonne santé des colonies… entre autres vocations de l’article de Mathieu Angot il y a celle-ci : attirer l’attention sur certains dogmes contreproductifs, même lorsqu’ils sont doctement professés.

  3. Faut arrêter de partager ça tel que c’est écrit là. Si je suis d’accord avec pas mal de ces principes, que j’applique d’ailleurs, d’autres sont carrément néfastes, tant aux abeilles elles-mêmes qu’aux voisins apiculteurs, hobbyistes ou pros. Parce que sinon il faut aussi laisser les tiques sur les chiens, les puces sur les chats, la gale sur le dos des vaches, les mouches sur le fromage, les morbac dans les poils de sgueg et les mycoses dans les vagins.

    • Bonjour,
      Nulle part je n’incite les apiculteurs a laisser les varroas envahir les ruches.
      Je propose de se poser la question du systématisme irréfléchi des traitements.
      Je suis persuadé que si les apiculteurs sont bien informés, et qu’on leur donne les outils nécessaire (comptages par exemple comme évoqué dans l’article), alors ils prendront de bonnes décisions.
      Ils ne sont pas plus idiots que vous et moi.

    • Bonjour et merci pour votre réaction,
      Relativisons un peu… un article comme celui de Mathieu Angot joue un rôle : celui de provoquer le débat en questionnant bon nombre de choses implicitement considérées comme normales en apiculture. Nulle trace ici de méthode miracle et encore moins de généralisation qui serait nécessairement abusive. L’article fait ressortir les idées reçues, les tensions et les contradictions, il délie les langues… c’est un bon point de départ pour commencer à faire bouger un peu les choses, et en matière d’apiculture il est grand temps.

      Qu’est-ce qui vous pousse à systématiser à la hâte ? Pour se prononcer sur ce qui est néfaste ou non, il faut rentrer dans les détails du sujet, nuancer, ne pas mettre tout sur le même plan. En particulier, assimiler les abeilles mellifères à des animaux domestiques et sur-géneraliser ce qui peut fonctionner chez elles sous certaines conditions ne produit rien de bon.

      Dans certains endroits, les abeilles mellifères parviennent à vivre avec le varroa, c’est un fait ! C’est très largement le cas pour A. m. capensis et A. m. scutellata en Afrique, c’est aussi le cas dans certaines conditions pour A. m. mellifera en France et ailleurs. Ce qui est intéressant selon nous c’est peut-être de se demander ce qui rend possible ce phénomène, et de réfléchir à ce qui l’empêche ailleurs. https://www.abeillesenliberte.fr/pourquoi-les-abeilles-meurent-une-cause-oubliee/

  4. C’est rigolo la solution miracle pour les pro qui doivent en vivre et faire vivre leur famille : « passer outre les objectifs économiques ». En somme, il n’y a pas de vraie solution, il y a juste une idéologie qui appelle à faire disparaître le métier parceque ce ne serait pas naturel etc… Et à la place il vaut peut-être mieux que tout le monde aille travailler à l’usine, c’est tellement moins capitaliste…

    • Bonjour Antoine, vous m’aurez sans doute mal compris.
      Nulle part je ne demande aux pros de changer leurs pratiques.
      Je m’adresse ici aux personnes qui ont le choix : les amateurs dont les ressources ne sont pas mises en jeu avec ce type de changements.
      Si le but était d’imposer un modèle « obligatoire » et seul légitime, alors la démarche n’aurait pas grand chose de punk.
      Chez nous on ne force pas les gens, on parle avec eux afin de connaître leurs objectifs, leurs contraintes, leurs envies.
      Celui qui est pro avec 500 ruches, et qui se plaît à travailler de cette façon, je n’ai aucun problème avec lui! Mais ce texte s’adresse plutôt aux amateurs ne se retrouvant pas dans un modèle amateur calqué sur celui des pros, alors que les contraintes ne sont pas les mêmes.

      Sur la disparition du métier d’apiculteur, je trouve que c’est un vrai débat tant historique qu’idéologique (ne serait-ce que pour la notion de « métier » elle-même), mais il nous faudrait un lieu plus adapté pour développer!

    • Bonjour et merci pour votre commentaire,
      L’article de Mathieu Angot suscite le débat, c’est en partie sa fonction. Y voir une solution miracle qui serait applicable partout et valable pour tous, c’est l’avoir mal lu.
      En France, les apiculteurs amateurs ne possèdent qu’un tiers des colonies mais ils sont actuellement les plus nombreux. Questionner leurs pratiques et ouvrir leur angle de vue a donc beaucoup de sens, ce que fait très bien Mathieu Angot.

      Pour autant, l’apiculture professionnelle n’est pas dispensée d’auto-critique. Au contraire, il y a un certains nombre de faits que l’on est en droit de considérer, comme l’introgression et les menaces pesant sur l’abeille noire, ou la diffusion des pathogènes par exemple. Sur cette plateforme, les articles de Lionel Garnery, de Jacques van Alphen ou de Gilles Grosmond vont dans ce sens.

      Selon nous, la question n’est pas d’abord de savoir si les pratiques apicoles sont « plus ou moins naturelles », mais plutôt de savoir si elles sont soutenables, si elles jouent un rôle positif ou négatif dans le maintien des écosystèmes et de leurs fonctionnalités. Dans ce domaine là comme dans beaucoup d’autres, poser des questions n’implique pas la volonté de détruire un métier ou une activité, il s’agit de les replacer dans une crise globale, d’examiner s’ils sont parties prenantes de cette crise, et s’il est possible de les transformer pour qu’ils fassent partie de la solution.

      En creusant ce sujet, nous découvririons peut-être que c’est plutôt une logique socio-économique qui détruit certains métiers (et qui en crée d’autres), notamment par la mise en concurrence avec des pays producteurs ne respectant pas les mêmes règles…pourquoi croyez-vous que les miels venus d’Asie envahissent le marché ? l’idéologie qui est derrière tout cela est autrement plus puissante et destructrice que celle que vous dénoncez, d’autant plus qu’elle imprègne nos représentations et se présente comme la norme.

      Dans la foulée, questionnons d’ailleurs cet argument en forme d’impératif strictement économique qui nous concernent tous : devoir faire vivre sa famille doit il tout justifier ? Les marchands de pesticides et les marchands d’armes peuvent très bien l’avancer aussi… si personne n’est irreprochable, cela n’empêche pas de se demander si nos activités sont socialement utiles et écologiquement soutenables et comment elles ont une chance de le devenir…

  5. Merci de votre article des plus sain et roboratif Mathieu, tant il est vrai qu’apprendre à désapprendre nécessite courage (celui de penser par soi-même et d’affronter les quolibets des tenants des doxa) et opiniâtreté, car désapprendre, c’est aussi réapprendre, mais seul (ou avec ceux, toujours minoritaires, qui prennent les chemins de traverse) : c’est, déjà, savoir ce qu’on ne veut pas ou plus, avoir l’esprit d’aventure (oser arpenter les chemins non balisés, sans savoir s’ils mèneront quelque part), écouter son bon sens (qui n’est pas, contrairement à ce que dit l’adage, la chose au monde la mieux partagée), entendre sa conscience (avoir une conscience n’est pas la chose au monde la mieux partagée non plus) ; c’est aussi prendre des risques, entre autres celui de se planter, de devoir affronter les échecs et de devoir nourrir et régénérer sa pensée à l’aune de ces échecs. Réapprendre, c’est donc accepter l’inconfort du perpétuel mouvement et de l’abandon des croyances et certitudes (a fortiori quand on interagit avec le vivant), c’est opter pour l’excitation, mais aussi la fatigue de la quête (possiblement infructueuse) et l’ouverture à l’imprévu, donc renoncer aux acquis sécurisants. Voilà ce que j’entends dans votre stimulant manifeste ! J’y entends aussi la saine éruption/irruption éthique du « Ca ne passera pas par moi ! » : l’extrême domination du vivant désormais partout banalisée et normalisée « ne passera pas par moi »… Comme me le dit une amie « spipollienne » (du programme Spipoll – https://www.spipoll.org – auquel nous participons toutes deux), on peut toujours dire non, on peut toujours faire autrement… Et elle parle d’expérience : voilà une quarantaine d’années, elle et son mari étaient agriculteurs dans le Sud-Ouest, ils produisaient des porcs et du maïs pour les nourrir. Rapidement, ils subirent d’importantes pressions pour produire plus et donc s’outiller plus, c’est-à-dire s’endetter et partant perdre leur autonomie tout en accentuant les pressions sur leur milieu de vie. Pressentant que, s’ils cédaient aux sirènes lancinantes et perverses du « produire toujours plus » (sous-entendu : pour gagner plus), ils deviendraient esclaves d’un système dévorant qui transforme tout, y compris les humains qui le servent, en moyens, en choses et non en fins, ils décidèrent, la mort dans l’âme pourtant (leur ferme héritée d’une longue lignée d’ancêtres paysans), de vendre leur exploitation et de changer de métier. Ils se lancèrent, sans certitude aucune, dans la production et le commerce de fleurs et… ça a marché, ils ont pu en vivre. Pari réussi ! Des gens qui ont su rester humains et libres en accordant conscience et action. Qui ont refusé de subir toujours plus de domination et d’accentuer encore celle qu’ils faisaient subir aux agrosystèmes qu’ils exploitaient déjà, mais à l’échelle d’une ferme à taille humaine. Etre libre, c’est avoir le courage de prendre le risque de se libérer !

    • Merci Isabelle pour ces encouragements! Lorsque nous avons des réussites, comme avec le mur à abeilles de Tessy-Bocage, cela encourage à continuer l’exploration!
      Merci!

  6. L’apiculture est un élevage d’abeilles domestiques plus ou moins intensifs selon les méthodes de nourrissage hivernal, selon le choix des cultures à butiner (cultures avec ou sans pesticides, fleurs des villes ou fleurs des champs,…), selon les choix de sélection génétique, selon les choix des reproducteurs (via insémination artificielle, par exemple => faible variation génétique), selon les choix des espèces (locales, ou mondiales comme la buck fast, d’où fragilité génétique, de nouveau).
    À ces choix d’apauvrissement génétique s’ajoutent des pathogènes (varroa) et des espèces invasives introduites par l’homme (frelon asiatique).
    En hiver pour compenser les prélèvements de miel, certaines abeilles sont nourries au sucre de betteraves traitées aux néonicotinoïdes, insecticides tueurs d’abeilles… 🙃
    En été, les ruches sont déposées dans des cultures intensives, plus ou moins traitées, d’autres choisissent des cultures bio.
    Pour obtenir le label miel bio, la France a descendu la norme. 51% des surfaces dans un rayon de 3 km en cultures bio sont suffisants! (En totale divergence avec l’alimentation des autres élevages où la part de l’alimentation bio est nettement supérieure.)
    Les élevages intensifs d’abeilles domestiques entrent aussi en compétition alimentaire avec les pollinisateurs sauvages. Lesquels meurent littéralement de faim.
    Intensification croissante si on espère répondre à la demande farfelue de l’industrie cosmétique. Récemment une publicité cosmétique se vantait d’utiliser du miel d’abeilles pour fabriquer sa gamme de produits ! Du biodiversité-washing dans toute sa splendeur.

    • Bonjour Isabelle et merci pour votre message,
      Nous vous rejoignons sur de nombreux points que nous avons tenté de documenter dans plusieurs publications. Cependant, nous pensons que la « domestication » des abeilles mellifères ne fait pas justice à la réalité de l’espèce à l’échelle du monde (des populations à l’état sauvage sont encore très présentes en Afrique par exemple), et ce statut ne correspond pas non plus à ce qui se passe sur le terrain en France et en Europe. Les colonies hébergées dans des ruches sont domestiques d’un point de vue strictement juridique (les apiculteurs en sont propriétaires) mais les spécialistes de la génétique ne parlent de domestication que lorsque la totalité du cycle de reproduction est manipulée. Ce n’est pas encore le cas même chez-nous, l’insémination artificielle n’étant heureusement pas généralisée. Les abeilles mellifères endémiques, même si elles sont malmenées par l’introgression et certaines pratiques apicoles, peuplent toujours par endroits nos territoires, y compris à l’état sauvage. Elles font partie de la biodiversité et ne peuvent pas être mise sur le même plan que des races artificielles comme les Buckfast…

    • En tant que fils d’éleveurs en vaches laitières, et ayant grandi dans une commune ou l’agriculture est très présente, je peux vous confirmer que non. Il y a un gouffre social, économique, idéologique, culturel, entre les différents éleveurs et leurs pratiques.

      Une ferme biologique produisant du lait sur de la prairie avec 50 vaches est incomparable avec un hangar rempli à craquer de 100 vaches qui ne voient jamais la lumière du jour.

      Il en va de même concernant les abeilles. L’éleveur fait des choix, en découlera un plus ou moins grand bien être animal, une plus ou moins grande production…etc…

      Certes, on peut considérer que cela rentre dans tous les cas dans le cadre de « l’exploitation animale », mais les différences entre les élevages sont indéniables.

  7. C’est effectivement saoulant que quand on parle d’hymenopteres on se réfère toujours à la protection de l’Apis melifera. C’est un peu comme parler des poules systématiquement quand on parle d’oiseaux. Protégeons les poules !! Elles nous donnent des œufs !! Quid des autres oiseaux… Ah ça…
    Je me souviens aussi d’une affiche de la journée des animaux. Un chat, un chien, une perruche et un poisson rouge. 😂 Vive les animaux !
    Je trouve plus intéressantes les Lasioglossum et les Anthidium par exemple, ces dernières sont de bien meilleures pollinisatrices que les Apis melifera dont les boules de Pollens collées aux pattes sont perdues pour la pollinisation.

  8. Pff, ok les new apis bobos quinoa prout prout qui font ça passke c’est « stylé » ne servent vraiment a rien, mais bon nombre d’apiculteurs sont vraiment investis dans une démarche sur le long terme et sont notre seule ligne de défense face au frelon a pattes jaunes

    • Concentrer autant d’intelligence, de bienveillance et de savoir dans une seule phrase, c’est de l’ordre de l’exploit. Un commentaire fort utile que nous conservons pour l’exemple !

    • Merci Steve pour ce message.
      Je répondrai à vos arguments dès l’instant ou je les aurai trouvé.

      Le frelon est loin d’être le soucis principal des apiculteurs, le varroa est très clairement le parasite le plus problématique. Les « apiculteurs investis dans une démarche long terme » dont vous parlez sont sans doute ceux qui ont importé varroa en voulant faire des économies de bout de chandelles sur les exploitation.
      Vous leur transmettrez mes sincères remerciements.

      J’espère ne pas avoir mal interprété votre message, mais admettez qu’il était plutôt vague.

  9. Post intéressant, qui rappelle que le miel, ce produit souvent associé à « sain », « naturel », « écolo », est aussi le fruit de pratiques (Fabrice Satori en parle un peu plus haut) qui rappellent celles de l’élevage intensif avec ses excès et ses dérives, et que les ruches ne sont pas configurées pour faciliter la vie des abeilles, mais celle des apiculteurs.
    D’un côté l’image de Maya chantonnante avec son petit pot de miel à la main, et de l’autre l’ingérence dans la vie des colonies allant jusqu’à la destruction des individus pas assez productifs.
    Je ne sais pas si je suis « punk » mais j’ai eu le plaisir de « posséder » (en fait, juste leur fournir le logement, et éventuellement la nourriture) quelques colonies d’abeilles (dont une qui s’était posée gracieusement dans mon petit jardin urbain 🙂 ) sans autre ambition que d’avoir le plaisir de les regarder, éventuellement la satisfaction de contribuer à les préserver… mais jamais la moindre intention de leur prendre leur miel !
    Donc, contrairement à ceux qui élèvent des abeilles pour en obtenir de l’argent, je fait partie de ceux qui paient pour avoir des abeilles. J’aime avoir une ruche et la regarder vivre de la même façon que je le fait avec un hôtel à insectes ou avec le nourrissage des oiseaux l’hiver.
    Alors si quelqu’un connait connait un groupe FB ou autre de personnes partageant les mêmes objectifs, je suis vraiment intéressé…

    • Bonjour Phizo Phizo,
      Par ici il y a un petit groupe Fb où on partage des infos sur l’abeille, nos expériences autour des ruches de biodiversité entre autres. Tu y es le bienvenu 😉 https://www.facebook.com/groups/926248609349027/

      Ps: Je ne sais pas si vous laissez passer des adresses Fb, pourriez vous lui faire passer en privé? Merci par avance et vous etes aussi les bienvenus 😉

  10. Je pense que beaucoup ne sont pas au fait de l apiculture , entre nourrissage , remerage,nombre de ruches indecents sur les ruchers, introductions de variétés étrangères, déplacements des ruches selon les mielés ,introduction d insecticide.Ya beaucoup de choses qu’ignorent les consommateurs et defenseurs des abeilles.

  11. Belle prose!
    Illusions poétiques.
    Affirmations plus que douteuses quant au bien-être de l’abeille « qui parfois s’adapte (rait) à varroa, grâce à sa capacité naturelle ». Comment s’assurer que celle-ci s’adaptera, mais pas celle d’à côté??? C’est, respectueux, rassurant de voir des centaines d’abeilles mutilées.
    C’est juste un slogan mensonger qui rassure les « punk » crédules, évangélisés par ces propos bonimenteurs.
    Quand un chien est envahi de poux, pourquoi ne pas le laisser se gratter des heures, des jours, des semaines??
    Je ne doute pas non plus que ces promoteurs de l’apiculture « punk » proposent à leurs « disciples un manuel pratique, imprimé sur papier recyclé, avec droits d’auteurs raisonnés.
    Plus positif, la lecture de cette propagande punk m’aura permis d’ajouter une case dans la catégories des propos de type « évangile selon… » qui sur les su les les plus variés sont légions sur internet.
    Meilleurs voeux!

    • Bonjour Jacques.
      L’illusion n’est pas toujours du côté de la poésie. On la trouve bien souvent du côté des dogmes qu’on ne questionne jamais.
      Cet article ne propose pas un « nouveau dogme », mais simplement de questionner l’ancien à la lumière de la science, de l’éthique et pourquoi pas du bon sens.
      Pour s’assurer qu’une colonie ne dépasse pas le seuil d’infestation critique auquel elle ne survivra pas, il existe les comptages varroa. Je pratique le comptage sur langes, mais également le comptage au sucre glace, que je trouve plus fiable et moins impactant que sa version avec « alcool » qui fait mourir 300 abeilles à chaque comptage.
      J’adapte mes traitements (biologiques) en fonction de l’infestation de la colonie. S’il n’y a pas de varroa, je ne traite pas (je me base sur les seuils conseillés issus des recherches scientifiques sur la question et relayés par les structures apicoles). Mes ruches sont suffisamment éloignées les unes des autres pour éviter la dérives et donc le passage des varroas de l’une à l’autre qui est documenté par la littérature scientifique lorsque les ruches sont placées trop proches les unes des autres.

      Si je ne suis pas malade, je ne prends pas d’antibiotique. De la même manière, je ne traite pas une colonie si elle n’en a pas réellement besoin. Il ne faut pas minimiser l’impact des traitements sur les abeilles, et il faut quand le contexte le permet le faire avec intelligence.
      Une étude réalisée par l’ONIRIS de Nantes (campus vétérinaire) révèle que les 3 molécules pesticide les plus présentes dans les colonies d’abeilles sont dues aux traitements varroas conventionnels. On connaît en outre les dégâts des « effets cocktail » que peuvent avoir ces pesticides combinés à d’autres molécules qui entrent dans la ruche au fil de la saison. C’est pourquoi je suis très prudent avec l’utilisation de ces produits.

      Si vous souhaitez allez un peu plus loin sur cette question et que vous lisez l’anglais, de nombreuses ressources scientifiques existent sur le sujet. J’en mets une partie à disposition en libre accès sur cette page : https://mathieua.fr/references-apiculture-naturelle.html

      Quand aux « droits d’auteur » je serai bien naïf si je comptais dessus pour manger. La réalité du monde de l’édition, c’est beaucoup de travail pour très peu de salaire. La motivation des auteurs est bien souvent ailleurs.
      En espérant avoir pu vous éclairer, je vous souhaite une belle journée.

  12. SALUT A TOI APICULTEUR PUNK!
    une colonie a préserver pour cette hiver, ma première, pas de miel pour moi, mais que d’émerveillement au trou de vol pour cette saison 1

  13. Un sujet qui va faire grincer des dents, et c’est essentiel ! Repenser nos acquis, nos savoirs et nos dogmes. Merci pour cette réflexion qui a le mérite de soulever les vraies questions dans ce monde que nous préparons pour les générations futures. Finalement, ne pas se demander ce que les abeilles peuvent faire (produire) pour nous, mais plutôt ce qu’elles peuvent nous enseigner..

  14. Bonjour,
    vos propos ne vont ils pas un peu à l’encontre de certaines de vos vidéos, je pense à celle ‘n’achetez pas d’essaims’, ou vous dites notamment qu’il faut s’occuper des abeilles, ne pas les laisser mourir l’hiver pour racheter des essaims au printemps suivant?

    • Question très pertinente !
      La philosophie punk n’invite pas à un nouveau dogme venant remplacer l’ancien. Elle invite a questionner les choses. Elle invite a utiliser la connaissance et une éthique pour alimenter votre libre arbitre. Donc, selon l’objectif de l’apiculteur, selon les connaissances auxquelles il a eut accès, et selon son éthique personnelle, il fera ou non comme son voisin.
      Mon avis sur la question est qu’il faut simplement être cohérent dans son apiculture. On ne peut pas demander à une colonie de nous produire deux essaims par an, plus 15 kilos de miel, et en plus lui demander de combattre toute seule le varroa. C’est techniquement impossible pour la pauvre colonie d’abeilles. Donc, dans un contexte de production, il est à ma connaissance impossible de se passer d’un traitement varroa.
      En revanche, en dehors de ce contexte de production, on constate que certaines colonies s’en défendent très bien. Pour exemple, nous venons de procéder à des comptages varroa sur des ruches en paille qui ont essaimé à plusieurs reprise cette saison : nous n’avons sur une partie d’entre elle quasi aucun varroa en chutes naturelles. D’autres en revanche s’en défendent moins bien et ont un seuil d’infestation élevé.
      L’apiculteur devant ce constat à le choix : il peut traiter ou non, ou faire selon l’infestation de chaque colonie, au cas par cas.

      • Merci pour votre réponse.
        Je retrouve dans vos explications une certaine mesure qui me semble un peu absente de l’article.
        Car en lisant vos propos au premier degré, l’apiculteur amateur lambda va se dire qu’il faut laisser faire la nature et ne pas traiter. Peu comptent les varroas, il est insidieux et invisible, alors que le frelon va mobiliser des trésors d’ingéniosité (à mon avis vains mais c’est un autre débat).
        Vous évoquez une apiculture de ‘production’, comment est-ce que vous la définissez? Une apiculture ou on agrandit l’espace de la colonie au printemps pour qu’elle stocke d’avantage de miel qu’elle n’en a besoin?
        Il y a un juste milieu, par exemple ne mettre qu’une hausse pendant la miellée d’acacia ou elles pourraient en ‘rentrer 2 ou 3 permet de récolter une hausse de miel et ‘blinde’ totalement le reste de la ruche en miel, sans besoin de nourrir jusqu’au printemps suivant.
        Le débat ne se situe-il pas plutôt dans la distinction entre l’apiculture professionnelle qui va forcément chercher une certaine optimisation de la production avec des méthodes standardisées, et les amateurs qui n’ont pas cet enjeux mais veulent parfois copier les professionnels dans leurs méthodes?
        Vous évoquez souvent ce mur à abeilles il faudrait le montrer dans une vidéo, je suis curieux de voir comment vous faites des comptages varroas sur ce type de ruche..

        • Oui, c’est en effet difficile d’être complet dans un court article. Mais le comptage varroa aura sa place dans le livre.
          Pour moi, l’apiculture « de production » est à optique professionnelle. Mais de nombreux amateurs, sans que ce soit une obligation pour eux, appliquent les mêmes principes (cela leur est enseigné partout).
          Sur le mur à abeilles, il y a quelques ressources sur le site de l’association Pistil, et nous travaillons à un ouvrage sur cette aventure. Mais nous sommes bénévoles, c’est un travail assez long!
          Le site Pistil : https://pistilasso.fr/

  15. Enfin des gens intelligents ! Vous avez écrit ce que j’aurais pu écrire! Mille fois bravo! J’étais également apicultrice pro et je fais la guerre aux écoles d’apiculteurs amateurs et professionnels pour qu’ils arrêtent leurs conneries! ❤️❤️❤️

    • Vous êtes pro! Bien!
      Mais que pensez-vous des propos ci-dessus concernant varroa?
      Ne vous arrive-t-il jamais de renouveler quelques reines?

      • On parle ici d’apiculture non productrice enfin pour ma part je prends le miel qu’elles veulent bien me laisser….
        pour ma part j’ai cueilli un essaim dans un pommier je l’ai mis dans une ruche horizontal que j’avais fabriqué et j’ai laissé faire la nature. et vous savais quoi ????
        j’ai été obligé d’aller sur une ruche de production pour voir à quoi ressemblait le varroa
        ma conclusion peut-être erroné et que plus vous aseptisez vos Reines et donc vos colonies plus êtes sujet aux maladies qui arrivent , elles n’ont plus de défense immunitaire pour se défendre elles même et au lieu de préservez vos abeilles vous nourrissez l’industrie agro-chimique
        cordialement
        Olivier apiculteur venant de se découvrir « Punk » 🙂 🙂

      • Bonjour Jacques, j’ai été pluri-actif sur une toute petite exploitation (une centaine de colonies). J’ai démarré en apiculture plutôt conventionnelle, un peu « comme tout le monde » pour faire vite. Mais en lisant beaucoup sur l’abeille et en faisant mes expériences sur mes colonies, je suis rendu compte que j’étais loin de respecter leur rythme naturel, alors que c’était important, éthiquement, pour moi (c’est très subjectif, j’en conviens). J’ai donc commencé à changer de méthodes : minimiser les nourrissement, bannir les cires industrielles, etc. Jusqu’au moment ou l’élevage de reines m’a posé problème. Dans mon système, ce n’était plus économiquement viable si j’arrêtais l’élevage de reines. J’ai donc dû faire un choix : soit continuer en rognant sur mes convictions, soit arrêter de gagner de l’argent avec mes colonies. J’ai opté pour le second choix.
        Aujourd’hui j’ai une vingtaine de ruches mais je n’ai aucun objectif économique. Je n’exclue pas de remonter le cheptel, pour produire des essaims en abeilles noire, mais sans élevage des reines et avec une gestion « naturelle » des colonies (ce sera peut-être l’occasion d’un article). Je dois bien avouer que l’activité me manque un peu, car une fois qu’on y a goûté… Difficile de s’en passer ! Et vingt ruches, c’est très peu quand on en a eut plus ! Mais je n’ai pas non plus envie de saturer mon secteur avec l’abeille mellifère, j’observe de nombreux pollinisateurs sauvages et il s’agit de trouver un équilibre pour éviter la concurrence. Tout est affaire de compromis !

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